Création d’une fiducie pour détenir une propriété résidentielle aux États-Unis.
Bien des Canadiens profitent de la baisse de valeur des propriétés immobilières pour faire l’achat d’une résidence secondaire aux États-Unis. Lorsqu’un tel achat est prévu, il faut déterminer quelle est la meilleure façon pour le client de détenir l’immeuble et quel sera l’impact potentiel sur les droits successoraux.
Or, depuis quelques années, la législation portant sur les droits successoraux américains est en constant changement. Des mesures plutôt avantageuses pour les citoyens américains et les particuliers domiciliés aux États-Unis sont en vigueur pour 2012, à savoir :
- Exemption à vie des droits successoraux de 5 120 000 $ US, procurant un crédit unifié de 1 772 800 $.
- Exemption de 5 120 000 M$ non utilisée par un conjoint pouvant être transférée au conjoint survivant. Cette mesure (appelée portability clause) ne vise toutefois pas les non-résidents américains.
- Taux marginal d’imposition des droits successoraux de 35 %.
Pour ce qui est des particuliers qui détiennent des biens aux États-Unis et qui sont non-résidents de ce pays aux fins des droits successoraux américains, peu de changements s’offrent à eux. En vertu de la législation fiscale américaine, un non-résident n’a pas de droits successoraux à payer et sa succession n’a pas à produire de déclaration de droits successoraux si la valeur des biens américains au décès est inférieure à 60 000 $ US. Si la valeur est supérieure à ce montant, la Convention fiscale entre le Canada et les États-Unis prévoit un allègement. Il s’agit d’abord de déterminer l’assujettissement aux droits successoraux en vertu de la table d’imposition. Une fois cette valeur déterminée, il est possible de demander uncrédit égal au plus élevé des montants suivants.
En fonction de cette formule, un non-résident américain n’aura pas de droits successoraux à payer si la valeur de sa succession mondiale n’excède pas 5 M$ US (ou 10 M$ US pour un couple marié si la succession du décédé demande le crédit marital). Sa succession doit toutefois produire une déclaration de droits successoraux américains.
Utiliser la fiducie
Une option gagne à être connue et bien comprise. Il s’agit de la détention de la résidence dans une fiducie irrévocable. Si la fiducie est bien structurée, il y aura alors élimination complète des droits successoraux américains, tant pour la personne ayant fourni les fonds à la fiducie aux fins d’acquérir la résidence que pour les bénéficiaires de la fiducie.
De façon générale, ce mode de détention est recommandé lorsqu’une nouvelle propriété est acquise par opposition au transfert d’une propriété dont le particulier est déjà propriétaire.
Une fiducie familiale discrétionnaire est généralement utilisée pour l’achat de la propriété.
Constituant
La personne qui fournira les fonds nécessaires pour l’acquisition de la propriété (« constituant ») ne pourra être ni bénéficiaire ni fiduciaire de la fiducie. Cela est important tant pour ce qui concerne l’impôt canadien que pour les droits successoraux américains.
En ce qui a trait aux droits successoraux américains, la législation fiscale américaine prévoit qu’un bien transféré par une personne sera notamment inclus dans sa succession si elle en conserve la possession ou la jouissance à la suite du transfert.
Donc, si une personne est bénéficiaire ou fiduciaire d’une fiducie à laquelle elle a transféré un bien, cette disposition trouvera application.
Donc, lorsqu’un couple désire procéder à l’achat d’une résidence aux États-Unis, l’un des conjoints fera la contribution financière à la fiducie alors que l’autre conjoint sera bénéficiaire.
Bénéficiaires
Si un bénéficiaire est considéré comme ayant une « faculté d’élire générale » (general power of appointment) à l’égard de la fiducie, la valeur des biens de la fiducie sera incluse dans la succession de ce dernier à son décès.
Cela s’applique notamment dans le cas où un bénéficiaire est fiduciaire et que les fiduciaires ont une discrétion relativement à la distribution du revenu et du capital de la fiducie en faveur du bénéficiaire.
Diverses solutions sont possibles afin d’éviter de conférer une « faculté d’élire générale » à un bénéficiaire :
- S’assurer que le bénéficiaire n’agit pas à titre de fiduciaire.
- Prévoir que les distributions du revenu et du capital en faveur du bénéficiaire sont basées sur un « critère vérifiable » (ascertainable standard).
Le « critère vérifiable » doit être lié à la santé, à l’éducation, au soutien ou à l’entretien de la personne.
Voici certains « critères vérifiables » ayant été jugés acceptables :
« – support;
– support in reasonable comfort;
– maintenance in health and reasonable comfort;
– support in one’s accustomed manner of living;
– health, support in reasonable comfort, maintenance or education. »
• Avoir un co-fiduciaire ayant des intérêts opposés à l’exercice de la faculté d’élire (adverse party).
• Prévoir des pouvoirs accrus en faveur d’un « fiduciaire indépendant », lequel aurait le pouvoir de faire des distributions de revenu et de capital n’étant pas assujetties à un « critère vérifiable ». Un fiduciaire indépendant dans ce contexte pourrait être un fiduciaire corporatif.
L’utilisation d’un fiduciaire indépendant est intéressante, entre autres, afin d’avoir la possibilité de distribuer les fonds résultant de la vente de la résidence ou de transférer la propriété à un bénéficiaire. De plus, il est utile d’avoir la possibilité de distribuer les biens de la fiducie advenant une abolition des droits successoraux américains.
Utilisation de la résidence
Une fois la fiducie créée, un bénéficiaire pourra utiliser la résidence détenue par la fiducie sans avoir à verser un loyer. Le constituant pourra également utiliser la résidence sans frais du vivant de son conjoint bénéficiaire. Cela est acceptable aux fins canadiennes et américaines.
Toutefois, après le décès du conjoint bénéficiaire, le conjoint constituant devra verser un loyer à la juste valeur marchande à la fiducie s’il veut continuer à utiliser la résidence.
Finalement, les dépenses courantes et d’entretien à l’égard de la résidence devraient être acquittées par le bénéficiaire utilisant la propriété. Les dépenses de nature capital devraient toutefois être payées par la fiducie. Si des fonds sont requis à cet égard, des contributions additionnelles pourraient être effectuées par le constituant à la fiducie.
*Ce texte se veut un résumé d’un article paru initialement dans le magazine Stratège de l’APFF, vol. 16, numéro 4, du mois de septembre 2011.
Laisser un commentaire
Vous devez être connecté(e) pour rédiger un commentaire.